En Allemagne même, le V1, mais surtout son système de propulsion ont inspiré bon nombre de constructeurs aéronautiques. A cette heure ou le IIIe Reich fait flèche de tous bois et qu'apparaissent de nombreux projets d'avions d'interception à grande vitesse Kleinstraketenjäger , la tentation est évidemment grande d'utiliser le pulsoréacteur. Il en est ainsi de Heinkel et son projet He P 1077 « Julia » ou Junkers avec son EF 126 « Elly ». Tous deux développent une version propulsée par pulsoréacteur de leur projet, soit le He P 1107 « Roméo » pour Heinkel et Ju EF 127 « Wally » pour Junkers.
Parallèlement, quelques constructeurs de planeurs comme   Gotha   ou encore des avionneurs comme Messerschmitt ont tenté de motoriser, avec le pulsoréacteur d'Argus, des appareils qui ne l'étaient pas. C'est le cas notamment du Me 328 développé comme planeur dès juillet 1941 dans le cadre du Projekt 1079 . Conçu par Jacob Schweyer, il avait été construit entièrement en bois, excepté les organes de commande, sous la désignation de Schnellkampfflugzeug (avion rapide d'attaque). En mars 1942, le RLM en propose la construction en six versions, trois comme chasseur et trois comme bombardier.
Deux versions du chasseur furent alors mises à l'essai :
                                          Me 328 A1                                                                         Me328 A2
Envergure :                         6,40 m                                                                                8,50 m
Longueur :                          6,80 m                                                                                6,80 m
Armement :                     2 x MG 151                                                             2 x MG 151 et 2 x MK 103
Propulsion :                  2 x Argus 014                                                                    4 x Argus 014
Vitesse :                            750 km/h                                                                            920 km/h
Mais qu'ils soient placés sous les ailes ou le long de la carlingue, le fonctionnement de deux, et a fortiori quatre pulsoréacteurs, s'avéra très vite compliqué, pour ne pas dire incompatible avec la structure en bois de l'avion, qui avait une fâcheuse tendance à se désolidariser.
Malgré tout, en vue d'une prévisible invasion alliée, le projet reprit vie, mais cette fois comme Schnellbomber (bombardier rapide). L'idée était en effet de porter avec cet appareil une torpille de deux tonnes pour attaquer les grosses unités. Le Messerschmitt 328, désigné, selon les termes même du cahier des charges, comme « artillerie côtière volante » fut alors décliné en trois versions :
- Me 328 B1 : d'un poids au décollage de 2 695 kg, il pouvait atteindre 680 km/h et transporter une bombe standard SD 500, sous le ski alors escamoté dans la carlingue ;
- Me 328 B2 : très semblable au B1 mais avec un réservoir supplémentaire, il pouvait porter une bombe standard SC 1000 ;
- Me 328 B3 : très semblable au B1, il pouvait, lui, porter une bombe standard SD 1400.
Cependant, les rédhibitoires problèmes de vibrations vont mettre un terme au projet au cours de l'été 1944.

U.S.A

Plus proches de la conception d'origine, les Alliés se sont lancés dans des programmes de copie, voire de développement du projet initial. Les Américains en particulier, qui au cours de leur progression sur le territoire français (juin/juillet 1944) furent les premiers à récupérer épaves et pièces de V1. Envoyés à Dayton (Ohio), ces éléments permirent l'élaboration, en un temps record, du projet MX 544 . Alors que Républic Aviation en construisait la cellule, Ford , contacté dès le 11 juillet concevait le pulsoréacteur sous la désignation PJ 31 (Pulse Jet). En moins de trois semaines, 25 modèles furent commandés et réalisés sous le nom de JB 2 Thunderbug (pour Jet Bomb 2 ). Décidée à retourner l'arme contre le Japon, l'armée américaine commanda dès le 2 août, 1 500 exemplaires de cet appareil, puis 3 000 et même 7 000 quelques temps plus tard. Si d'apparence extérieure, la JB 2 ne se distinguait du V1 que par des différences mineures, en revanche le système de contrôle en vol fut totalement remanié ; les Américains misant plus sur une version téléguidée de l'arme. Le système de lancement par réactifs chimiques, jugé trop complexe, fut également abandonné, au profit du berceau-porteur propulsé par fusées à poudre. Pourtant, au fur et à mesure de la reconquête du Pacifique, le projet perdit de son intérêt et à la fin du conflit, 1 200 JB 2 seulement étaient construites.

Sous le nom de LTVN-2 (Launch Test Vehicle Naval) « Loon » , la marine américaine avait elle aussi développé une copie embarquée du V1 et avait pour cela aménagé deux sous-marins ( USS Carbenero et USS Cusk ), ainsi qu'un navire de ligne ( USS Norton Sound ).

U.R.S.S

Les Russes qui avaient, comme l'Allemagne entamé des recherches dès les années 30 ne disposaient cependant que de missiles avec propulsion à poudre à l'aube de la deuxième guerre mondiale. Le retard sur l'Allemagne était cependant considérable et la mobilisation massive d'ingénieurs et de techniciens n'y put rien changer. Les soviétiques n'entrèrent en possession d'une épave de V1, fournie par les Anglais, qu'en octobre 1944, et comme les Américains, en entreprirent une copie. Elle aboutit au projet CH 10 , dont la ressemblance avec le V1 était évidemment des plus troublantes. Comme les Américains également, les Russes abandonnèrent le lancement par réactifs chimiques au profit de la propulsion par fusées à poudre. La capture du matériel et d'usines allemandes, puis le début de la guerre froide vont toutefois redonner un nouvel élan au projet soviétique. De modifications en performances décevantes, le CH 10 ne parvint à sa forme la plus aboutie, identique à celle du V1, qu'en 1954, à la fermeture du centre d'études. Le CH 10 finit alors lamentablement sa carrière comme engin-cible pour artillerie antiaérienne.

France

Rangés derrière les deux superpuissances opposées dans la guerre froide, quelques autres pays, dont la France, tentèrent de récupérer la technologie du V1, mais pour l'évaluer, l'adapter, plus que la reproduire en grande série. Dans un premier temps, au Centre interarmées d'essais d'engins spéciaux de Colomb-Béchar la France a mené l'évaluation de V1 propulsés sur de simples rails de chemin de fer, à l'aide d'un chariot porteur muni de fusées à poudre. Par la suite, pour l'entrainement des pilotes ou des équipes de DCA, les marines britanniques et françaises ont conjointement utilisé l'engin-cible Arsenal 5501 CT 10, dont la filiation avec le V1 est des plus évidentes. Réalisation de Nord-Aviation (SNCAN), le CT 10 se compose de six éléments qui peuvent être facilement assemblés, et par conséquent aisément remplacés en cas de détérioration :
- partie avant en acier qui contient la radiocommande et le pilote automatique;
- partie centrale qui protège le réservoir ainsi que l'alimentation en carburant;
- partie arrière en aluminium qui supporte les empennages;
- la voilure, de conception similaire à celle du V1 avec longeron traversant et deux ailes cantilever en aluminium;
- les empennages avec gouvernes de profondeurs commandées par vérin électrique et double dérive fixe en bois qui lui donne une étrange ressemblance avec le projet “Erfurt”. Il est à noter que le CT 10 ne possède pas de gouverne de direction car le changement de cap est obtenu par inclinaison de l'appareil;
- le pulsoréacteur, copie du modèle Argus, ne possède que quatre gicleurs et ne développe que 180 kg de poussée, compte tenu du fait que le CT 10 ne pèse que 660 kg.
Pour son lancement, le CT 10 repose sur un berceau équipé de deux fusées développant 4 t pendant 1,5 s, ce qui lui fournit une accélération proche de 12 g et une vitesse initiale de 370 km/h. La catapulte en châssis tubulaire, inclinée à 5 °, mesure 12 m de long et peut être implantée au sol ou sur le pont d'un navire. Dès son envol, le CT 10 est stabilisé par un gyroscope de roulis avant d'être pris en charge par une radiocommande fixe ou embarquée dans un avion suiveur, sachant que son rayon d'action est de l'ordre de 50 km. La durée de vol est de 45 minutes, ce qui offre au CT 10 une portée de 320 km environ. Cinq commandes sont possibles : virage à droite, à gauche, piqué, cabré et atterrissage. Cette dernière déclenche l'arrêt du pulsoréacteur, la vidange du réservoir, et l'ouverture d'un parachute lorsque la vitesse de décrochage est atteinte. Le CT 10 entame alors sa descente, pointe vers le bas pour se ficher dans le sol, les derniers mètres étant ralentis par le déclenchement de rétrofusées à commande barométrique. En cas de chute en mer, ces fusées ne sont pas utilisées et l'engin est facilement récupérable puisque qu'il est étudié pour flotter. Raison pour laquelle, le site des îles du Levant fut bien souvent préféré à celui du Centre interarmées d'essais d'engins spéciaux de Colomb-Béchar pour la poursuite, jusqu'en 1958, des évaluations. Au total, 400 de ces appareils furent tout de même construits.

   Né en 1948, il se passionne dès son plus jeune age pour la Seconde Guerre Mondiale, puis plus précisément pour les fortifications de cette période.

   En 1977, il rédige déjà dans la Gazette des armes, un premier article qui a longtemps fait référence sur les bases de V1. Dans les revues Archéologie Bunker, Le mur et fortifications, il signe ensuite une série d'articles consacrée aux radars allemands, aux batteries "Todt", "Lindermann", Plouharnel" ainsi qu'aux défenses de plages et "Panzertellung". Dans le même esprit, il publie en 1988 un livre récapitulatif des ouvrages cötiers de l'armée de terre (Heer) dits de la série 600. Il réalise par ailleurs de nombreux travaux de dessin pour d'autres publications ou guides e visite, autant en France qu'en Allemagne.

   Le V1, arme du désespoir qu'il publie maintenant chez Lela Presse www.avionsbateaux.com est le fruit de vingt ans de recherche sur l'arme, mais aussi les bases qui ont ....
   Né en 1948, il se passionne dès son plus jeune age pour la Seconde Guerre Mondiale, puis plus précisément pour les fortifications de cette période.

   En 1977, il rédige déjà dans la Gazette des armes, un premier article qui a longtemps fait référence sur les bases de V1. Dans les revues Archéologie Bunker, Le mur et fortifications, il signe ensuite une série d'articles consacrée aux radars allemands, aux batteries "Todt", "Lindermann", Plouharnel" ainsi qu'aux défenses de plages et "Panzertellung". Dans le même esprit, il publie en 1988 un livre récapitulatif des ouvrages cötiers de l'armée de terre (Heer) dits de la série 600. Il réalise par ailleurs de nombreux travaux de dessin pour d'autres publications ou guides e visite, autant en France qu'en Allemagne.

   Le V1, arme du désespoir qu'il publie maintenant chez Lela Presse www.avionsbateaux.com est le fruit de vingt ans de recherche sur l'arme, mais aussi les bases qui ont ....
JB2 Loon
H   E   R   I   T   I   E   R   S

Témoins du passé

Par Yannick Delefosse